mercredi 25 mars 2015

La rage de construire



Quel qu’en soit le côté un peu narcissique, il ne me semble pas inutile de faire un petit détour autobiographique.


Tout jeune, ma passion constructive transformait les puzzles à cubes en murailles cyclopéennes. Par la suite jeux de dominos et de cartes me servaient à élaborer autoroutes aériennes, fragiles châteaux.


L’apothéose en quelque sorte : un prix à La Baule pour un château médiéval.

Mais la construction des châteaux de sable me fut riche d’enseignements :

·       Fragilité de toute construction humaine, soumise aux marées mais aussi au vent, au soleil, à la pluie

·       Indifférence voire malignité humaine : « désolé, j’avais pas vu » ; « c’est la faute au ballon » ; mais aussi méchanceté pure et rage de détruire l’œuvre des autres.


Après d’aussi bons débuts, ma voie était toute tracée. Après la parenthèse de mai 68 (qui me vit édifier nombre de gradins dans les salles de classes transformées en amphithéâtres où les AG reconstruisaient le monde, jour après jour) j’entrais dans la vénérable École Nationale des Ponts et Chaussées.


Mais dès la première année, en 70, je découvrais la programmation avec l’archaïque et foutraque Fortran II, puis le Basic au GOTO machiavélique, et par la suite l’ésotérique Algol 60, le décevant Pascal … Quelle extase néanmoins ! Les poutres en béton calculées en quelques minutes, après des heures à puncher des cartes et à attendre le verdict du compilateur (toujours à râler).

En troisième année je choisissais l’option Recherche Opérationnelle et Informatique.

Le stage de fin d’étude (à 3 en quelques mois) ne consistait pas moins qu’à définir un nouveau langage graphique interactif et interprété, puis à réaliser son compilateur-interpréteur. Nous réussîmes !
La démonstration était faite en particulier en animant les automates de Von Neumann. 

Mais auparavant il nous fallut maîtriser les arcanes de la BNF, des matrices de Griess et des automates à états finis. Et puis aussi le « système » de l’IBM 1130 de l’ENPC auquel nous tenions compagnie la nuit : nous dûmes réécrire le driver de disques du fait de l’exiguïté de la place sur disque (l’équivalent de 2 Mégaoctets, soit moins que la plupart des mémoires vives actuelles) qui nous servait de Swap pour nos programmes : 32Kmots de 16bits, on en voit vite le bout !              Le tout avec l’élégant macro-assembleur de l’IBM.


Dans le même temps, la naissante IA me fascinait de plus en plus : le Golem ne pouvait se concevoir sans un minimum d’intelligence ! Jusqu’où pouvait-on aller dans la création de robots aptes à nous remplacer ?

Après avoir été tenté par les prestigieuses universités américaines, je décidais de faire un DEA à ParisVI avec Jacques Pitrat et Jean-Claude Simon, puis une thèse en démonstration automatique de théorèmes en algèbre de 73 à 75.

Pendant mon DEA, je travaillais également à mi-temps dans une SSII, le CERG, qui travaillait en particulier pour des aménageurs comme la SCIC (Caisse des Dépôts), des cabinets d’ingénierie comme la SERETE. C’est d’ailleurs pour ce cabinet que j’y accomplis un de mes « faits d’armes » : je parachevais l’écriture d’un programme de tracé automatique de graphes Pert/Potentiel pour table traçante Benson. Il avait été commencé par un de mes camarades de promotion, sur la base d’écrits américains, mais était resté en chantier. 

Le succès fut total : après quelques mois, une équipe de 20 dessinateurs-projeteurs fut dissoute ! (Que les âmes sensibles se rassurent, la Serete était en expansion et leurs talents furent utilisés à d’autres tâches de dessin).

Bon ! La suite au prochain numéro : après une année passée au Cinquième Génie, EDF-RTE-EDF.

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